Notre avis : Wayne Wang est un cinéaste chinois qui a émigré aux Etats-Unis. Wang avait 40 ans à l'époque de ce film, il en aujourd'hui 76. Il n'a d'ailleurs jamais cessé de remonter le film jusqu'en 2021, date de cette nouvelle restauration. Son commentaire sur Hong-Kong éclaire sa vision critique où la corruption rivalise avec les gangs mafieux. Tourné sans scénario préétabli, souvent caméra à l'épaule, il réalise là un film choquant, provocateur, où il ne nous épargne rien, avec un humour corrosif... Un film du cinéma underground américain se déroulant intégralement à Hong Kong. A mi-chemin entre le documentaire (on croit dès le début que c'en est un !) et la fiction. On adore ou pas, rien à voir avec les deux films pré-cités... Une curiosité ! Gérard Chargé - 2 Zooms -
Notes par Maxime Bauer extraites du site
East Asia : "
Wayne Wang axe son commentaire politique sur plusieurs niveaux. Le film voit le jour en 1989, alors que le massacre de la Place Tian’anmen vient d’avoir lieu à Pékin. Hong Kong devant être rétrocédé à la Chine sous l’égide du Parti Communiste Chinois en 1997, la société de la ville au port parfumé connaît de multiples interrogations. 1989, 1997, Tian’anmen, la révolution culturelle, Hong Kong, l’Amérique du Nord par la présence du personnage principal et narrateur de l’histoire (ainsi que l’évocation du Canada, terre d’accueil importante pour les Hongkongais), tous ces lieux, évènements et dates sont évoqués et discutés dans le film, dans plusieurs couches de dialogues, de protagonistes et de situations narratives originales. La narration est constituée de chapitres, dont la plupart consiste en la rencontre du personnage principal avec quelqu’un de l’entourage de cette triade, à travers ses yeux à la première personne et l’interlocuteur en face déclamant son monologue. Loin de servir de but en blanc un discours politique clé en main,
Wayne Wang, et ses associés créatifs
Spencer Nakasako et
Amir Mokri (qui campent plusieurs postes dans le staff, notamment scénaristes, mais aussi et surtout acteur principal pour
Nakasako et directeur de la photographie pour
Mokri) composent une situation de brouillard général, où le personnage principal se retrouve plongé dans le Hong Kong des triades, des boucheries et des mariages d’apparence, où chaque personnage déploie sa vision du monde avec beaucoup d’assurance, de bizarrerie mais aussi de mystères et de non-dits. Ces personnages consistent en un tueur de canards, un sans-abri aveugle, des hommes de main du boss, le boss, sa maîtresse, sa fille, les beaux-parents riches, etc. Derrière eux,
Wayne Wang gratte le vernis de la société hongkongaise, qu’il estime dirigée par l’argent, avec tout l’imaginaire négatif que cela induit. Derrière d’autres protagonistes, comme le pianiste exilé du continent campé par
Lo Lieh,
Wang ouvre sa fenêtre d’analyse sur le monde chinois et ses flux internes. En faisant parler ces personnages,
Wang ouvre des fenêtres sur des thématiques lourdes, les tourne en dérision par la tonalité choisie, et en les imbriquant de la sorte, crée une atmosphère de chaos tout à fait saisissante – le sans-abri aveugle prédit une apocalypse en 1997."